Raid et bivouac en kayak de mer

Comment organiser une randonnée itinérante en kayak de mer

Certaines sorties kayak et notamment les raids en kayak de mer impliquent de bivouaquer durant la majeure partie du séjour.

Cette page se propose d’expliquer aux débutants comment se déroule un raid en kayak de mer et notamment le bivouac.

Corse-octobre 2013-couché de soleil sur le bivouac

Corse-octobre 2013-couché de soleil sur le bivouac

Qu’est-ce qu’un Raid ?

Un raid en kayak de mer, comme un « raid nature » est une randonnée sur plusieurs jours. Cette épreuve est découpée en étapes journalières : il faut se rendre d’un point A à un point B en navigant sur l’eau. Ce périple itinérant permet d’être au contact le plus proche avec la nature. C’est un moyen d’être seul face à la nature, de découvrir la faune, la flore et des paysages magnifiques.

Un raid en kayak peut s’accompagner si cela est au programme ou si la météo nous y force à interrompre momentanément la navigation au profit de randonnées pédestres qui permettent de découvrir autrement le patrimoine naturel et culturel local. Les activités de plage et la baignade permettront de profiter des plages. La randonnée aquatique (snorkeling) avec palmes, masque et tuba est aussi possible et permet de profiter de la vie sous-marine.

Le raid permet une immersion totale en environnement naturel sur une longue période de temps (entre 4 et 12 jours généralement). Le dépaysement est garanti ! Les contacts avec la civilisation peuvent être rares, c’est pourquoi il faut pouvoir être autonome plusieurs jours d’affilée en eau et nourriture.

Corse 2013 - tentes sur la plage

Corse 2013 – tentes sur la plage

Les phases du raid

Le raid est composé des 4 principaux éléments suivants :

  1. la préparation du raid (étape la plus longue)
  2. la navigation en kayak
  3. le bivouac
  4. les transferts (transports vers le point de départ et navettes intermédiaires éventuelles)

La préparation

La préparation est un travail minutieux, elle est réalisée par le responsable de la randonnée. Cela comprend notamment :

  • adapter le niveau de difficulté en fonction du niveau des participants
  • définir avec soin l’itinéraire à suivre en fonction du niveau de difficulté souhaité, de la géographie, des points de ravitaillements et des lieux possibles pour le bivouac tout en respectant les réglementations locales
  • anticiper les éventuelles navettes nécessaires en voiture et prévoir des plans alternatifs en cas de mauvais temps ou de blessure
  • préparer le matériel nécessaire pour réaliser le raid : bateaux, équipements de sécurité, matériel de camping, trousse de secours…
  • préparer les menus et acheter la nourriture
  • suivre la météo au jour le jour et adapter le raid en conséquence
  • gérer le groupe des participants, les informer et les accompagner tout au long du raid
  • etc.

La préparation n’est pas un acte solitaire, le responsable délèguera de nombreuses tâches aux participants.

Une checklist est souvent élaborée avant chaque raid afin que chaque participant pense à emporter tout le nécessaire.

Niveau de difficulté

Le niveau de difficulté d’un raid se mesure en fonction de :

  • la longueur (kilométrique) des étapes
  • le nombre total de jours de navigation
  • les conditions climatiques (températures de l’air de l’eau) et l’état de la mer (vitesse du vent, hauteur des vagues) : ces dernières sont difficilement prévisibles avant la sortie

On identifie 3 niveaux de difficulté, sachant que les raids difficiles sont très rares :

  • facile : idéal pour les débutants (entre 15 et 25 km la journée sur 4 jours)
  • moyen : réservé aux kayakistes habitués aux sorties (plus de 20 km / jour, entre 4 et 10 jours)
  • difficile : réservé aux kayakistes confirmés (souvent plus de 35 km/jour)

Niveau de difficulté des raids

Notre club organise des raids dont le niveau oscille entre facile et moyen, rares sont les raids difficiles (1 seul par an). En 2014, on a organisé 19 sorties dont 4 raids (de 4 à 12 jours) impliquant un bivouac.

Une bonne forme physique et mentale est indispensable à la pratique du kayak en raid, d’où un nécessaire entrainement préalable.

La vie en collectivité

La vie en collectivité n’est pas toujours facile, maintenir la cohésion est primordiale en raid. Il faut partager toutes les tâches dont la préparation des repas. Certains peuvent plus que d’autres à certains moments. De l’entraide, de la bienveillance, de la solidarité sont nécessaires, autant que de la convivialité.

On est limité par la capacité de chargement de bagages dans les kayaks, donc tout le monde doit faire l’effort de n’emporter que les affaires personnelles indispensables et de garder de la place pour le matériel collectif.

Corse 2013 - rhum

Corse 2013 – rhum

Sécurité

Tous les raids ne sont pas accessibles à tous, certains demandent entrainement et technique.

Il est impératif de suivre les consignes données par le responsable de la navigation qui est le plus à même de connaître les dangers ou les atouts d’un lieu de débarquement, un itinéraire à suivre…

La sécurité de tous implique de rester groupés, on ne navigue jamais plus vite que le plus lent de tous.

Se former est indispensable (suivre les stages « sécurité », passage de pagaie, session de formation interne au club…), surtout pour la navigation en mer ou en eau vive. On suivra un rythme de formation et de progression régulier : séances d’entraînement, sorties à la journée, puis sorties le week-end, avant d’aller en raid.

Qu’est-ce qu’un Bivouac ?

Un bivouac est un campement rudimentaire permettant de passer la nuit en pleine nature en dehors de toute infrastructure prévue pour dormir. Ainsi le bivouac est plus rustique que le camping : pas de toilettes, pas de douche, pas d’eau chaude, pas de point d’eau potable, pas d’électricité, et souvent pas de réseau de téléphonie mobile. Vraiment seuls face à la nature !

Réaliser des bivouacs implique d’être parfaitement autonome durant la période que dure le raid. Ce qui n’empêche pas le ravitaillement dans des ports et villes au cours du raid, ni de faire ponctuellement des navettes en voiture si besoin.

Suède-01 août 2014

Suède-01 août 2014

Suède-01 août 2014

Suède-01 août 2014

Quelques exemples

  • Raid sur la Loire (facile) : 3 nuits en bivouac le long du fleuve sur les îles et bancs de sable
  • Raid autour de l’île d’Elbe (difficile) : 4 nuits en bivouac sur le bord de mer, 1 nuit d’hôtel, 2 nuits en camping
  • Raid en Suède (moyen) : 8 nuits en bivouac sur les îles de la baie de Stockholm, 3 nuits en camping, 1 nuit à l’hôtel
  • Raid en Corse (moyen) : 7 nuits en bivouac sur les plages, 2 nuits sur le ferry
  • Raid en Sardaigne (difficile) : 8 nuits en bivouac sur les plages, 2 nuits sur le ferry
  • Raid à Turku (facile) : 9 nuits, alternance entre bivouac (4), camping (3), chalet (1), nuitée chez l’habitant (1)

Pour une description complète du fonctionnement d’un raid et du bivouac, je vous invite à lire le compte rendu détaillé du Raid en Corse d’octobre 2014

Le matériel indispensable

Pour être autonome sur plusieurs jours, il faut emporter l’équipement adéquat. La page « Équipement de randonnée pour le kayak de mer » décrit dans le détail la liste des choses à emporter avec soi.

La tente est l’élément indispensable pour être à l’abri du vent, de la pluie, de l’humidité du sol et des animaux la nuit venue.

Corse-19 octobre 2014-montage des tentes

Corse-19 octobre 2014-montage des tentes

Trouver le bon site

Lorsque le soir vient, on se met en quête d’un lieu de bivouac avant que la nuit tombe. Il faut trouver une plage (de sable ou de roche plate) assez grande pour accueillir le campement qui peut prendre beaucoup de place selon le nombre de participants.

Le campement sera constitué des zones suivantes :

  • les kayaks mis hors de l’eau et regroupés entre eux,
  • les tentes,
  • l’espace repas.

Dans le cadre d’une plage déserte, il n’y a pas de problème pour s’étaler, mais dans le cas d’une plage fréquentée, il faut veiller à gêner le moins possible. S’il reste des promeneurs ou des baigneurs sur la plage, il faut attendre le dernier moment (le coucher de soleil) pour monter les tentes (d’où l’utilité de la lampe frontale).

Avec un peu d’entraînement, il faut moins de 30 mins pour monter entièrement le camp.

Les tentes pourront être montées sur tout type de sol :

  • une plage de sable fin
  • de la terre
  • de l’herbe
  • de la roche nue
  • de la roche avec des lichens et de la mousse épaisse
  • dans les sous-bois

Quand il n’est pas possible de planter ses piquets (sol dur), on peut utiliser des grosses pierres dans la tente (tente auto-portée) ou à l’extérieur pour tendre les cordes des tentes.

Avec un peu de chance, il sera possible de faire sécher les affaires et vêtements mouillés en tirant une ficelle entre deux arbres, sur des rochers ou encore sur des barrières disposées là.

Surveiller le niveau d’eau

Les kayaks doivent être stockés à une distance raisonnable de l’eau pour éviter qu’ils ne se fassent emporter par des vagues ou la marée durant la nuit. Pour surveiller le niveau de l’eau, on peut s’aider d’un bâton qu’on plante pour démarquer le niveau d’eau et surveiller une éventuelle montée de son niveau au cours de la soirée.

Il en va de même pour les tentes qui doivent rester à distance de l’eau, y compris du sable mouillé. Rien de pire que de dormir sur un sol humide !

Le repas

A CKLOM, le principe est du repas collectif en toutes circonstances : petit déjeuner, repas du midi et repas du soir. Le club possède tout le nécessaire pour préparer et servir les repas : brûleurs et bouteilles de gaz, cocotte minute, casseroles, récipients, assiettes, gobelets et couverts de toutes sortes. Les repas se préparent puis se partagent collectivement. Il en va de même pour les corvées de nettoyage. Et le matériel collectif est réparti dans tous les kayaks.

Nous n’emportons pas avec nous des plats tout préparés ou conserves toutes prêtes. Nous privilégions la bonne cuisine faite à base de produits frais que nous emportons dans nos kayaks. Le repas est un moment de convivialité qui participe au maintien d’un bon moral nécessaire pour affronter la longueur du raid.

Faire du feu

Il est presque toujours interdit de faire du feu sur les sites protégés, surtout en période de sécheresse. Sinon, prendre des mesures pour être en situation de l’éteindre rapidement (avec de l’eau ou du sable) et s’assurer qu’il ne puisse pas se propager à la végétation alentour.

Écologie et respect des lieux

Les raids et la pratique du kayak se placent sous le signe du respect de la natureNous prenons un soin particulier à ne laisser aucune trace de notre passage, voire à laisser les lieux plus propres que nous les avons trouvés : nous ne laissons aucun déchet derrière nous. Nous les emportons avec nous et les déposons dans les bennes appropriées dans les ports que nous croisons.

bernaches du canada dans les roseaux

Suède : bernaches du canada dans les roseaux

Nous ne dérangeons pas les animaux, ni n’abîmons les zones protégées (dunes, roselières, etc.).

Hygiène

Forcément, les conditions d’hygiène lorsqu’on n’a pas accès à l’eau courante ni à l’eau chaude sont plus spartiates qu’au camping 4 étoiles. Une toilette à l’eau de mer avec un savon adapté est suffisant pour tenir 10 jours. Il suffit de se sécher avec une serviette (microfibre) pour éliminer le sel et se sentir bien. Pour les hommes, la barbe n’est pas gênante sinon le rasage peut se faire à la « fraiche » sans mousse.

Nous utilisons des produits d’hygiène et de vaisselle spécial mer biodégradables (qui moussent même à l’eau de mer).

Réglementation

La règle d’or du bivouac est la discrétion : montage le soir au dernier moment et démontage tôt le matin.

En dehors de quelques réserves naturelles, le bivouac est généralement autorisé en France. En revanche, le camping de plusieurs nuits est souvent interdit. Le bivouac consiste alors à établir un campement temporaire du coucher au lever du soleil.

Le ravitaillement

Pour les raids de seulement 4 jours ou moins on peut emporter toute la nourriture et l’eau nécessaire dans les kayaks, ce qui ne nécessite pas de ravitaillement en cours de route.

pompe à eau

pompe à eau

Dans les autres cas, pour les raids de longue durée, il convient d’emporter avec soi de quoi faire face aux 4 prochains jours et de se ravitailler régulièrement en cours de raid dans les ports et villes croisés durant la navigation. L’itinéraire aura prévu à l’avance les points de ravitaillement possibles en eau et en nourriture. On trouve toujours de l’eau dans un port. Par sécurité, il faut toujours avoir un repas de secours et ne jamais naviguer sans avoir de quoi manger.

Les transferts

Les transferts sont les transports vers le lieu de première étape, puis le retour au bercail lorsque le raid est terminé. Les durées de transferts sont à prendre en compte dans la durée du raid. Ils peuvent se faire selon tout les modes possibles (voiture, avion, bus, ferry) avec ou sans kayaks (qui peuvent être loués sur place).

Le club utilise généralement pour ses sorties et raids un minibus de 9 places et une remorque (pouvant embarquer jusqu’à 12 bateaux). Des voitures personnelles complètent si besoin le dispositif.

Les navettes

Les navettes (optionnelles) sont les moments de transports hors kayak au milieu du raid qui peuvent être nécessaires pour se ravitailler où faire un break comme se rendre dans un lieu touristique pour visiter ou randonner à pied.

Par exemple, pour des raids en Europe où le transport en voiture n’est pas prohibitif, nous partons généralement avec un minibus de 9 places + une remorque avec les kayaks montés dessus. Ce minibus sert aux transferts mais aussi aux navettes. Ainsi si nous avons préparé la nourriture pour la totalité du raid mais que cela ne rentre pas entièrement dans les kayaks lors du départ, alors quelques jours après le départ, nos retournons au minibus là on nous l’avons laissé (on s’y rend en transport en commun), nous ramenons le minibus là où le raid s’est interrompu pour procéder au ravitaillement, puis on reprend le raid. On peut répéter cette opération autant de fois que nécessaire.

Variabilités climatiques

Un raid de longue durée comme une sortie à la journée est soumise aux aléas de la météo locale, qu’il faut accepter humblement. Il est impossible de prévoir à l’avance le temps qu’il peut faire ni de maîtriser les conditions climatiques en mer (par essence très variables) surtout à l’étranger.

La préparation en amont permet de prévoir les équipements et vêtements nécessaires pour la navigation (tenue mouillée) et le bivouac (tenue sèche et équipement pour dormir). Il faudra toujours prévoir de quoi faire face à un épisode climatique hors norme (froid inhabituel, pluie, vent).

Il faut aussi savoir renoncer quand les conditions météo deviennent défavorables compte tenu du niveau du groupe, voire dangereuses. Il nous arrive régulièrement de devoir renoncer à 1 ou 2 jours de navigation au cours d’un raid ou d’une sortie de longue durée, cela fait partie du jeu.

Les raids ont toujours lieu dans des périodes de l’année où les conditions météos sont les meilleures (en été dans l’hémisphère nord).

Conclusion

Voilà, c’est pas sorcier !

Le raid en kayak de mer avec bivouac est un grand classique de CKLOM, c’est une chose à faire au moins une fois dans sa vie. On en revient toujours avec des étoiles dans les yeux et pleins d’anecdotes à raconter…

Il n’est pas nécessaire d’avoir un gros niveau en kayak pour en profiter. Le suivi normal de l’entrainement en cours d’année et la participation progressive aux sorties permettent en moins d’un an d’être préparé pour les raids.

 

Cette page a été rédigée à plusieurs mains : Hugo, Annie, Hervé, Louann, Claire, Muriel…

Ceci ne se prétend pas un guide exhaustif sur le raid et le bivouac mais se veut une première approche afin de démystifier auprès des adhérents novices ces notions toutes particulières.

Ne préparez jamais seul un raid, faites appel à des organisateurs confirmés.

2 Responses to Raid et bivouac en kayak de mer

  1. Meur Pierre dit :

    Bonjour,
    Je projette de louer avec mon amie 2 kayaks en Norvège fin août, sans guide ou moniteur, pour naviguer dans les fjords autour de Bergen, en bivouac. Je lis votre récit sur votre séjour en Suède, probablement proche de ce que nous voudrions faire, mais à deux, une semaine. J’ai du mal à trouver des informations sur un éventuel permis ou licence nécessaire là-bas. Nous n’en avons aucun mais connaissons bien la mer, j’ai un permis hauturier et suis moniteur de voile légère. Si vous aviez des conseils à nous donner sur le kayak bivouac en Scandinavie, nous serions très preneurs.
    Je vous remercie.

  2. Hugo dit :

    bonjour,
    Le bivouac est libre en Suède, il faut juste se tenir à distance des maisons.
    Il n’est pas nécessaire d’avoir un quelconque permis ni en France ni en Suède pour naviguer en kayak.
    Il y a de nombreux loueurs et la pratique du kayak est répandue par làbas …
    Attention quand même à la météo, à la sortie des fiords, un effet venturi forci le vent au passage des caps (un peu comme dans les calanques de Marseille).
    C’est là un beau projet. Nous nous limitons à la partie sud de la scandinavie pour avoir chaud en été : 15-20°C dans l’air l’après-midi, 19°C dans l’eau, 10°C la nuit.
    Hugo

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